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CLEF DU GRAND OEUVRE


CLEF DU GRAND OEUVRE - OU LETTRES DU SANCELRIEN TOURANGEAU
Dans la première, sera enseigné où trouver la matière des Sages. Dans la seconde, les vertus et merveilles de l'Elixir blanc et rouge, sur les trois Règnes de la Natures. Dans la troisième, adressée à mon frère, sera prouvé la réalité du Grand Oeuvre par tout ce qu'il y a de plus positif dans l'Histoire sacrée et profane, qu'il a été et sera toujours le fondement, ainsi que le premier mobile de toutes les Religions du monde. Et dans les suivantes, jusqu'au nombre de dix, tout ce qu'il est permis d'écrire sur cette Science, sans passer les bornes prescrites pour conduire les Élus au but désiré.
In sale omnia, sine sale nihil.

Avis préliminaire aux amateurs de vérités spagyriques

Ami lecteur, si tu crois la transmutation des métaux possible, que tu te sentes un esprit désintéressé, une ferme résolution de n'être que le dépositaire passager des trésors, que Dieu voudra bien te confier, pour, en les recevant d'un main, en aider de l'autre ton prochain le plus secrètement qu'il te sera possible, lis moi; c'est pour toi que j'écris. Mais si tes intentions sont d'amasser des trésors pour ton usage seulement et satisfaire tes passions, crois-moi, ne perds pas ton temps à me feuilleter, car je n'écris point pour instruire les avaricieux, mais pour les Élus seulement.

Tu n'as pas besoin d'aller chercher d'autres livres que ceux que je te cite, et même si tu es avancé dans la lecture des Philosophes, et que tu commences à les comprendre; le "Triomphe hermétique" doit seul te suffire. C'est Nicolas Flamel qui m'a d'abord indiqué la première matière, et le "Triomphe hermétique" me l'a fait comprendre, comme tu verras par la suite, en sorte qu'il n'y a pas un seul des Philosophes que je ne puisse expliquer à la lettre; et je m'étonne, depuis qu'il a plu à la divine providence de m'ouvrir les yeux, comment j'ai pu être pendant tant d'années à employer en lectures, et tant de temps pour comprendre une chose si aisée, n'y ayant pas un seul des vrais Philosophes qui ne parle clairement, n'enseigne la première matière et ne la nomme suffisamment pour la faire comprendre les uns d'une façon, les autres d'un autre, suivant les différentes opérations par où elle passe.

 Je ne crois pas qu'il soit à propos de justifier la science par des arguments; ayant lu qu'Arnauld de Villeneuve, Philosophe du premier ordre, ne put jamais prouver à Raymond Lulle que la transmutation des métaux existât, ce qu'au contraire, Raymond Lulle, par des paroles auxquelles Arnauld de Villeneuve ne put répondre, le convainquit sans réplique que la transmutation métallique était impossible selon le cours ordinaire de la Nature, de dont Arnauld convint pour l'instant et demanda sa revanche pour le lendemain à un temps fixe. En étant convenus l'un et l'autre, et s'y étant rendus, Arnauld de Villeneuve dit alors à Raymond Lulle : "Hier vous m'avez justifié, par des arguments invincibles, que la transmutation métallique était impossible, et je ne pus par des paroles vous prouver le contraire. Aujourd'hui, sans vous parler, je vais vous justifier par effet qu'elle est véritable."

En conséquence, ayant fait devant Raymond Lulle la transmutation des bas métaux en or et en argent, de quoi, Raymond Lulle convaincu, avoua que cette science ne pouvait se prouver par arguments; il fit des excuses à Arnauld de Villeneuve, qui, inspiré à son sujet, lui apprit le secret, et l'initia presque sur le champ dans tous les mystères les plus secrets, en sorte qu'il est parvenu à un des premiers degrés, et n'a cessé, comme saint Paul, de confesser toute sa vie son endurcissement et sa conversion.

Aussi, si je réussis, comme je l'espère, las et rebuté de tout ce que j'ai entendu contre notre divine science, depuis plus de vingt ans que je lis les Philosophes, je ferai quelques transmutations publiques devant l'élite des premiers Médecins, et des travaux pour l'embellissement de Paris si considérables, et portant le nom d'où on aura sorti l'argent, et qu'à l'avenir, personne n'osera soutenir la transmutation métallique impossible, ce qui est aller contre la puissance de Dieu, car enfin dans la Création primitive, n'a-t-il pas dit à toutes ses créatures, après les avoir bénites : "Allez, croissez et multipliez".

Quelle prérogative auraient donc les végétaux par dessus les métaux, pour que Dieu eut donné de la semence aux uns et en eut réfuté aux autres ? Les métaux ne sont-ils pas en aussi grande autorité et considération devant Dieu que les arbres ? Il faut donc convenir, soutient le Cosmopolite, que rien ne naît sans semence; car où il n'y a point de semence, la chose est morte, eu égard au composé.

Les métaux en ont donc reçu une de la Nature, où ils ont été produits sans semence, s'ils sont sans semence, ils ne peuvent-être parfaits; car toute chose sans semence est imparfaite; celle des métaux est le mercure et le soufre, qui ne peuvent, en quelque corps que ce soit, des métaux vulgaires, trouver dans la terre une chaleur suffisante pour y mûrir et se régénérer d'eux-mêmes, et si cela était ainsi, il en naîtrait un grand inconvénient; car toute la terre où il croit des métaux, ne ferait que métal, où il y a des pierres, que pierres, des minéraux, que minéraux et ne serait plus propre à rien autre chose.

L'homme, la bête, ni les végétaux ne vivant pas et ne pouvant croître parmi les métaux, les minéraux, ni les pierres. Voila pourquoi Dieu n'a pas permis qu'ils pussent se régénérer d'eux-mêmes en terre par le grand inconvénient qu'il en arriverait. Mais Dieu a permis que l'homme put, en les prenant, où la Nature a fini, les reproduire sur terre; et les métaux morts qu'ils sont, en faire des métaux vivants, et il a donné ce secret à quelques uns selon son bon plaisir, qui nous en ont laissé des livres, qui ne sont pas trop faciles à comprendre du premier abord; mais qu'à force de lire, relire, méditer avec patience, on parvient quelques fois  d'en comprendre le véritable sens, non pas d'une dixième ou vingtième fois, mais plus souvent à millième, comme il m'est arrivé à moi-même sans jamais me rebuter entièrement, comme je te l'exposerai par la suite.

Car il y a longtemps que je pourrais réciter par coeur les principaux passages ci-après rapportés, et si j'ai le bonheur de réussir comme je l'espère, et que je te donne le détail de ma vie et de ce que j'ai souffert entr'autre depuis vingt ans; je ne crois pas qu'il y ait quelqu'un par la suite qui fut curieux d'entreprendre la lecture des Philosophes. Mais ceux qui y sont parvenus (Zachaire et le bon Trévisan entr'autres) racontant leurs travaux : cela m'a encouragé, toujours flatté qu'à force de patience et de prières continuelles, je pourrais fléchir la miséricorde de Dieu, et que pensant sur l'emploi que j'en ferai, comme mes modèles, j'obtiendrai de sa bonté, la m^me grâce que je te souhaite ami lecteur; car selon le Cosmopolite, il serait utile que toute la terre habitable fut remplie de Philosophes.

Lis-moi avec attention; point de chimère dans la tête, point d'autres occupations, point de manipulation avant d'entendre les Philosophes, et tu connaîtras alors que tu n'as pas besoin de beaucoup de choses, surtout n'employer or, argent, ni mercure, ni minéraux quelconques, "sel al trament", "borax", végétaux de toutes espèces et genres, d'animaux, ni de tout ce qui peut sortir d'eux, soit aquatiques, bipèdes, volatils, rampants, dans l'eau, dans la terre, sur la terre.

Et souviens-toi qu'il te faut un seul métal vivant, réduit à sa première matière, qui est le soufre et le mercure "rébis" des Philosophes; et souviens-toi encore que d'un arbre naît un arbre, d'un homme un homme, d'un  métal un métal. Et qu'il te faut la semence seulement et non le corps duquel tu ne peux rien faire, s'il n'est réduit à sa première matière, qui est son sperme et sa semence, comme te le disent tous les Philosophes, lequel attirera ses menstrues suivant le poids de la nature, qui est son vaisseau et le feu secret des sages. Rien de plus facile à comprendre; je te le jure encore une fois, et rien pareillement de plus facile à exécuter, comme Basile Valentin te le dit pour te dire adieu à la fin de ses douze clefs.

Celui qui a la matière trouvera bientôt un fourneau, comme celui qui a de la farine ne tarde guère à trouver un four, et n'est pas beaucoup embarrassé pour faire cuire du pain.

Pour te faciliter entièrement dans ce commencement et te conduire comme par la main, lis avec attention les dix paragraphes suivants et en exécutes les préceptes.

Paragraphe I

Malheur à celui qui, pour faire de l'or ou de l'argent philosophique, se servira d'autre matière que du sperme et semence de l'or et de l'argent, qu'il tirera d'un métal vivant après l'avoir réduit à sa première matière, sans y employer aucun feu artificiel ou élémentaire, autre que celui secret de la nature, qu'il placera dans son vaisseau aussi secret pour commencer son ouvrage où la nature a fini le sien, sans pouvoir s'écarter du règne métallique, ni faire aucun mélange de quelque façon et nature qu'il puisse être, ne connaissant point et même ignorant profondément les poids de la nature.

Paragraphe II

Malheur à celui qui emploiera l'or, l'argent et le mercure vulgaire, avant d'avoir trouvé leur menstrue vivant, leur dissolvant naturel dans lequel ils se fondent, à l'aide du vaisseau secret de la nature, comme la glace dans l'eau chaude, et qui les réduit à leur première matière, les tire des bras de la mort et les rend vivants, sans quoi ils ne trouveront que perte et dommage.

Paragraphe III

Malheur à celui qui pour tromper ses frères, se vantera de savoir faire la pierre; mais n'ayant pas de l'argent pour y travailler, demandera par avance de l'or, de l'argent ou quelqu'autre chose de prix; et fou celui qui l'écoutera et s'y fiera.

Paragraphe IV

Malheur à celui qui emploiera pour la confection de l'oeuvre autre matière que celle ci-dessus désignée, dont le prix au total ne peut excéder à Paris six livres, et en province dix sols pour faire le premier aimant, et qui demandera quelque chose pour la seconde matière, qui ne coûte que la peine de la ramasser et se trouve partout.

Paragraphe V

Malheur à celui qui demandera pour faire l'oeuvre en entier, tout compris, fors le temps et la nourriture d'un seul homme, plus de vingt-quatre livres, dans lesquels entreront l'or et l'argent pour la fermentation, dont un gros de chacun sont plus que suffisants, l'huile et tous les vaisseaux généralement quelconques.

Paragraphe VI

Malheur à celui qui, sachant ou croyant savoir l'oeuvre, confiera son secret sans connaître à fond le sujet, ou offrira de le vendre pour or et argent au Grands de la Terre, jamais il n'y parviendra.

Paragraphe VII

Malheur éternel aux présomptueux qui, croyant connaître par mes instructions le secret, et comment opérer pour le mettre à fin, se forgeront dans la t^te des idées chimériques de richesse et de possession sur la Terre, ou qui, ayant obtenu de Dieu quelque don pour guérir ses frères, leur vendra bien cher ce qu'il aura trouvé gratis; car il sera renversé dans ses idées et n'approchera jamais de la Table Sacrée.

Paragraphe VIII

Malheur à vous, Riches de la Terre qui, non contents de la fortune que Dieu vous a accordée, en désirez de plus considérables, et sous l'espèrance d'y parvenir aisément, écoutez ces souffleurs de charbons qui font métier et marchandise de vous tromper, et sous de vaines et imaginaires promesses, vous dissipent votre réel pour courrir après le fictif. Je vous avertis charitablement que vous serez leur dupe; qu'ils ne vous procureront que pertes, dommages et angoisses, et qu'ils ne savent que l'art de vous surprendre.

Paragraphe IX

Encore que ces huit paragraphes dussent être suffisants pour faire ouvrir les yeux aux fourbes et à leur dupe, il faut entièrement que je leur cloue la bouche pour l'avenir par une vérité, à laquelle ils ne pourront jamais répondre. Esprit Saint, ne me quittez point dans ce pas difficile, que de même que la colonne de feu éclairait les israélites, pendant la nuit et la nuée obscure, les cachait pendant le jour aux poursuites de l'armée de Pharaon, que la verge d'Aaron dissipa et engloutit les serpents que les faux prophètes de ce roi firent paraitre; de même aussi, Ô mon Dieu ! accordez à vos philosophes que ce que je vais révéler de plus secret, sur quoi aucun jusqu'à présent n'a osé écrire, soit impénétrable pour ceux que vous n'en jugerez pas dignes; ouvrez les yeux aux uns et fermez-les à ces avaricieux, comme Elisée ferma ceux des soldat du roi de Syrie, qu'il conduisit en Samarie sans savoir où ils allaient; que je les conduise de même de précipice en précipice, qu'ils n'y voient qu'obscurité dans la plus forte lumière. Eclairez au contraire vos élus, comme vous avez fait depuis le commencement du Monde; qu'ils puissent conserver le secret que vous leur avez confié d'âge en âge, sans que jusqu'à présent rien n'en ait publiquement transpiré; qu'il soit conservé, suivant votre sainte Volonté, jusques vers la fin du Monde, ou par punition de ceux des grands pêcheurs qui y existeront, vous permettrez qu'il soit révélé afin de troubler tout l'ordre public, d'enlever la subordination, et alors, tout étant dans le même rang de richesse, le trouble et la confusion se mèlera parmi eux, comme il arriva dans la confusion des langues de la tour de Babel; ce que vous avez fait annoncer par votre Prophète Nostradamus, dont on méprise aujourd'hui et les Prophèties et la personne, ainsi qu'il a toujours été d'usage à l'égard de ceux dont on ne connait point la force des écrits. Je rapporterai à la fin de cette Lettre la Prophètie, et l'expliquerai à la lettre.

Paragraphe X

Ecoutez, fils des sages, la sentence irrévocable que je vais prononcer en dernier ressort, sontre les sophistes souffleurs et fourbes; et vous, dupes, prêtez des oreilles attentives.

Notre première matière, commencement de l'Oeuvre, l'antimoine d'Artéphius, l'humidité visqueuse de Zachaire, le sec qui attire naturellement son humide : cette masse confuse de la lumière sortant des ténèbres, où les yeux du vulgaire ne voient que fèces et abominations, ce reste du chaos de la première matière du Monde, ce dissolvant universel de la nature, cet esprit cru qui doit extraire un esprit mur du corps dissout, et derechef l'unir avec l'huile vitale pour opérer les miracles d'une seule chose; ce "menstrue" végétal uni au minéral qui doit dissoudre un troisième membre essentiel pour composer la "foudre" des Philosophes, cet esprit de Philalète qui ressemble à un métal fondu dans le feu, cette mine de l'acier de Cosmopolite, cette source de la fontaine du Trévisan, cette humidité selon l'Espagnet avec laquelle la Nature commence toutes ses générations; l'ouvrage de la pierre que l'art doit commencer où la Nature a fini, cette nature qui se réjouit dans sa nature, contient nature et surmonte nature; enfin cet Argent Vif de Geber, pour la création duquel il loue et bénit le Seigneur de lui avoir donné uns Substance, et des Propriétés qui ne se rencontrent en nulle autre chose de la Nature; et à l'occasion duquel Philalète ajoute que sans lui les alchimistes auraient beau se vanter, tous leurs ouvrages ne feraient rien; tout ceci, dis-je, qui ne traite que d'un seul sujet sous diverses opérations, se doit commencer et cuire dans le vaisseau et au feu secret de la nature, sans pouvoir l'aider en façon quelconque par aucun feu artificiel ou élémentaire de quelque espèce qu'il puisse être, soit d'eau chaude, de charbon de toute espèce, de "motte-à-bruler", de lampe, bougie, fumier, chaux et tous autres, sans en excepter aucun.

La plus légère lumière, fut-elle d'un seul fil d'or, troublerait la nature dans cette première opération, où il faut qu'elle rest seule et cachée; et j'ajoute plus encore : c'est que dix sols sont plus que suffisants pour faire connaître si l'on est dans la véritable voie d'obtenir l'eau sèche, qui ne mouille point les mains. Voilà ce qui a jamais été dit de plus clair sur la première matière, et de plus instructif pour ceux qui désirent en savoir les premières connaissances, et je jure, sur tout ce qu'il y a de plus saint, que je sais ce que je dis et que je l'ai écrit à la lettre; et quoique je n'ai point encore opéré comme j'en conviens, j'ai pour mon guide le Trévisan, qui comme moi connaissait la première matière, a fort savamment disputé contre des Philosophes aui avaient la Pierre; ce que tu peux vérifier. Je puis sans me glorifier, mais moyennant la Grâce de Dieu, faire la même chose.



FIN






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