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DE L ALCHIMIE




Rappel étymologique, le terme Alchimie vient de l'arabe al-Kimiya, qui par le latin médiéval donna le mot alchemia. Les termes Alchimie et Chimie sont restés synonymes jusqu'à l'apparition de la chimie moderne à partir du XVIIIème siècle.


Qu'est-ce que l'Alchimie ? Pour nous, ce n'est qu'une science "naturelle", mère de la Chimie moderne. Mais les alchimistes eux-mêmes définissaient-ils leur art ? "L'Alchimie, dit PARACELSE, est une science qui apprend à changer les métaux d'une espèce en une autre espèces." (cf : le Ciel des Philosophes). C'est la définition qu'en donnent la plupart des alchimistes, ainsi, Denis ZACHAIRE dans son "Opuscule de la Philosophie naturelle des métaux" dit : "C'est une partie de la Philosophie naturelle, laquelle démontre la façon de parfaire les métaux sur Terre, imitant la nature en ses opérations, au plus près de luy est possible", Roger BACON, esprit exact, donne une définition beaucoup plus précise : "L'Alchimie est la science qui enseigne à préparer une certaine médecine ou élixir, lequel étant projeté sur les métaux imparfaits, leur communique une perfection dans le moment même de la projection." (cf : Miroir d'Alchimie). De même, "l'Argyropée et la Chrysopée" est l'art qui enseigne à donner à la matière prochaine de l'or et de l'argent la forme de ces métaux" (cf : G. CLAVES : Apologia Chrysopoeioe et Argyropoeioe).

Au XVIIIème siècle, où la Chimie brillait de tous ses éclats, il fallut différencier les deux sciences et voici comment en parle Dom PERNETY : "La Chymie vulgaire est l'art de détruire les composés que la nature a formés et la Chymie hermétique est l'art de travailler avec la nature pour les perfectionner (cf : "Fables grecques et égyptiennes").

Mais tous ces alchimistes n'ont pas envisagé que la haute Alchimie; il y avait, en effet, deux sortes d'alchimistes, à savoir, les "souffleurs", gens dépourvus de théorie, travaillant à l'aventure, ils cherchaient, il est vrai, la "PIERRE PHILOSOPHALE", mais de façon empirique, entre temps ils pratiquaient de la Chimie "industrielle"; fabriquant des savons, de fausses pierres précieuses, des acides, des alliages, des couleurs. Ce sont eux qui donnèrent naissance aux chimistes, ce sont eux qui vendaient pour de l'argent le secret de "faire" de l'or, charlatans et filous ils fabriquaient de la fausse monnaie. Plus d'un "souffleur" fut pendu au gibet, supplice réservé à ce genre d'imposteur. Les "philosophes hermétiques" au contraire, dédaignant ces travaux qu'ils affublaient du nom de "sophistications", s'adonnaient à la recherche de la PIERRE PHILOSOPHALE non point par cupidité mais pour l'amour de la science. Ils avaient des théories spéciales qui ne leur permettaient pas de s'écarter de certaines limites dans la recherche du Grand Oeuvre.

Ainsi, dans la préparation de la Pierre Philosophale, les "philosophes hermétiques" ne travaillaient que sur les métaux et généralement sur les métaux précieux. Tandis que les "souffleurs" faisaient défiler dans les cornues des produits hétéroclites du règne végétal, animal et minéral. Aussi les "philosophes" persévérèrent-ils dans la voie qu'ils s'étaient tracée, leurs doctrines traversant intactes  les siècles, alors que les "souffleurs" abandonnèrent peu à peu des recherches très longues et très coûteuses pour finalement s'occuper de choses prosaïques, mais d'un bon rapport.

On ne peut mieux résumer la question qu'en citant un passage de la "Phisica Subterranae" de BECCHER : "Les faux alchimistes ne cherchent qu'à faire de l'or, les vrais "philosophes" ne désirent que la sciences, les premiers ne font que "teintures", sophistications, inepties, les autres s'enquièrent des principes des choses".

Ce distinguo étant établi, nous allons maintenant examiner les problèmes que les alchimistes se proposaient de résoudre; Le premier et le principal consistait dans la préparation d'un composé, nommé "Élixir", "Magistère", "Médecine": la PIERRE PHILOSOPHIQUE ou PHILOSOPHALE, ayant la faculté de transmuer les métaux ordinaires en or ou argent. On reconnaissait deux "élixirs", l'un blanc pour l'argent, l'autre rouge pour l'or. Les alchimistes grecs connaissaient cette distinction; le premier "élixir" "blanchissait" les métaux vils, le second les "jaunissait" (cf : BERTHELOT :"Origine de l'Alchimie"). La Pierre Philosophales n'eut d'abord, à priori, qu'un simple pouvoir de transmutation des métaux, mais plus tard, les "philosophes hermétiques" lui reconnurent une foule d'autres propriétés : Produire des pierre précieuses, guérir toutes les maladies (panacée), prolonger la vie humaine au-delà des limites ordinaires, donner à celui qui la possède "la science infuse" et le pouvoir de commander aux "choses célestes", etc...

Certains alchimistes, dans leur orgueil, crurent pouvoir égaler le Créateur, ils pensaient pouvoir générer un être doué de vie. Suivant la légende, Albert le GRAND avait construit un automate de bois, un androïde, auquel il avait donné la vie par de puissantes conjurations. PARACELSE alla plus loin et prétendit créer un être vivant fait de chair et d'os : l"Homunculus". On découvre d'ailleurs dans son traité "De natura rerum" la façon de procéder. PARACELSE indique très sérieusement dans cet ouvrage le "parti que l'on peut en tirer et la manière de le nourrir" ??

Les alchimistes cherchaient en plus l"Alkaëst" ou dissolvant universel. Sous forme liquide, l'Alkaëst pouvait dissoudre tout corps que l'on y plongerait. Les uns crurent le découvrir dans la "Potasse Caustique", d'autre dans l'"Eau Régale",  GLAUBER ,quant à lui, dans son "Sel Admirable" (sulfate de soude). Les alchimistes avaient oublié un détail d'importance; l'Alkaëst dissolvant tout, il aurait attaquer le contenant. Mais comme il n'y a d'hypothèses si fausses qui ne fassent découvrir quelques vérités, en cherchant l'Alkaëst les alchimistes trouvèrent plusieurs corps nouveaux.

La "Palingénésie" peut comme concept être rapproché de l'"Homunculus". Ce mot signifie résurrection, c'est, en effet, une opération par laquelle on reconstitue un arbuste, une fleur, avec ses seules cendres. KIRCHER dans son "Mundus Subterraneus" a indiqué la façon de faire renaître de ses cendres une fleur.

Les alchimistes essayèrent aussi de recueillir le "Spiritus Mundi", l'esprit du Monde. Cette substance répandue dans l'air saturée des influences planétaires possédait une foule de propriétés merveilleuses, notamment celle de dissoudre l'or. Ils la cherchait dans la rosée, dans le"flos coeli" ou "nostoc", sorte de cryptogramme qui apparaît après les grandes pluies : "La pluye de l'équinoxe me sert d'instrument pour faire sortir de terre le flos coeli ou la manne universelle que je vais cueillir pour la faire corrompre, afin d'en séparer miraculeusement une eau qui est la vraie fontaine de jouvence, qui dissout l'or radicalement" (DE RESPOUR : "Rares expériences sur l'esprit minéral").

Le problème de la quintessence était plus rationnel, il s'agissait d'extraire de chaque corps les parties les plus actives; le résultat immédiat fut le perfectionnement des procédés de distillation.

Enfin, les alchimistes cherchaient l'"or potable". Selon eux, l'or étant un corps parfait, ce devait être un remède énergique et communiquer à l'organisme une résistance considérable à toutes espèces de maladies. Les uns se servaient d'une solution de chlorure d'or, tel qu'on peut le lire dans le passage suivant : "Si on verse abondamment de l'eau dans cette solution et qu'on y mette de l'étain, du plomb, du fer ou du bismuth, l'or étant précipité a accoutumance de s'attacher au métal vil. Et aussitôt que vous remuerez l'eau, l'or précipité, qui ressemble à un limon trouble, se rassemble dans l'eau" (GLAUBER : "La Médecine universelle").

Mais souvent les empiriques vendaient fort cher, sous le nom d'"or potable", tout liquide offrant une belle couleur jaune, notamment une solution à base de chlorure de fer.

Comme nous le voyons, les alchimistes ne manquaient pas de sujets pour exercer leur patience; mais le plus grand nombre, délaissant ce qui pour eux était secondaire, ne poursuivait que LA réalisation du GRAND OEUVRE. La plupart des traités de philosophie hermétique n'abordent d'ailleurs que le thème de la PIERRE PHILOSOPHALE.